Des Strade Bianche à Liège : les 4 missions d'Alaphilippe
Dernière mise à jour : 24 mars 2023
Véritable star du peloton, Julian Alaphilippe tentera de se racheter de sa saison passée et dévoile en exclusivité ses quatre objectifs du début de saison : Strade Bianche, Milan-Sanremo, Tour des Flandres et Liège-Bastogne-Liège
Trois Monuments dont une qui aimerait le devenir, le double champion du monde libéré du phare d'eau du maillot arc-en-ciel va tenter de cocher ses quatre lignes directrices l'amenant au Tour de France. Son hiver studieux et sa victoire sur la Faun Ardèche Classic le met sur la bonne voie pour l'amener sur les plus grandes courses du calendrier. Du 5 janvier au 23 avril, le coureur de la Quick Step joue très surement le gros morceau de sa saison, d'autant plus que son patron Patrick Lefévère à réaliser des sorties assez houleuses sur son coureur au vu de ses dernières performances.
ACTE 1 : LES STRADE BIANCHE
Véritable amoureux de la course italienne, Julian Alaphilippe n'a pas caché son attirance pour les Strade Bianche qui a débuté un 5 mars 2019, lui offrant un magnifique bouquet devant Jakob Fuglsang pour une première participation. « Je crois que c'est ma course favorite. L'atmosphère, l'ambiance, le pays, les lieux. La Toscane est un endroit incroyable en Italie, soulignait Julian.
Véritable casse-cou sur son vélo, les routes blanches sont propices aux qualités du champion français, d'autant plus que des montées raid comme le Monte Sante Marie qui a fait la renommer de la course italienne après l'attaque puis l'envolée chevaleresque jusqu'à Sienne de Tadej Pogacar. Le Monteaperti, le Colle Pinzuto - là où le trio (Fuglsang, Van Aert, Alaphilipppe) victorieux en 2019 c'était échapper - et le Tolffe avant que la Via Caterina ne crucifie ses participants, une course extrêmement usante.
« C'est une course atypique, il peut se passer tout et n'importe quoi en quelques kilomètres.
Et l'année suivante, il y a le duel avec Mathieu Van der Poel, encore une belle course. Il était vraiment impressionnant, je me souviens que j'avais du mal à récupérer après chaque secteur. J'ai serré les dents jusqu'à la ligne, j'étais aux crampes dès que je produisais un effort. Il était vachement plus frais, il a décollé et j'ai fait deuxième." L'année suivant sa victoire, Julian était de retour pour batailler avec LE meilleur : Mathieu Van der Poel.
Après deux écrémages intégrales à 50 puis 25 bornes, le champion du monde Alpahilippe avait été le seul à suivre le champion des Pays-Bas malgré un coup de pétard phénoménal. Arrivée dans le mur final, Julian verra le scénario s'inverser dans la Via Caterina, VDP était tout simplement un cran au-dessus pour s'imposer dans la Piaza del Campo. Malchanceux l'année d'après, une bourrasque de vent l'enverra valsée dans le champ en compagnie d'une partie du peloton, et de toute manière, l'ogre Slovène Tadej Pogacar avait des crocs acérés, personne la revue après un solo majestueux, à la hauteur de son talent.
ACTE 2 : MILAN SANREMO
Julian aime particulièrement faire ses gammes en Italie. Après les Strade Bianche, les tifosis ont de bonnes chances de voir courir le français sur leur terre lors de Tirreno-Adriatico avant le premier monument de la saison, Milan Sanremo. « Pogacar a vraiment dynamité le Poggio l'an dernier. Quand on voit comment il marche depuis le début de saison, je pense que ça peut être un Poggio qui va encore faire mal aux jambes, analysait-il.
Ce qu'il a oublié, c'est que lui était aussi le protagoniste de la Primavera en attaquant au même endroit, au bon souvenir de 2020, lorsqu'il s'échappe avec Van Aert dans la roue. Voulant tester un autre scénario que sa victoire un an auparavant au sprint devant une troupe de bolide (20 coureurs). Véritable créateur de mouvement, Julian n'était ce jour du 8 aout 2020 - décalé en raison de la pandémie de covid juste avant le Critérium du Dauphiné (12 - 16 aout et du Tour de Lombardie, 15 aout) - pas passé loin d'une seconde victoire, battu par le Belge d'un souffle.
Julian pourrait aussi nous concocter un nouveau scénario, une offensive dans la Cipressa (5,6 km à 4,1%) à 23 kilomètres n'est pas à écarter et y a d'ailleurs penser : « Une attaque dans la Cipressa ? Il se passe tellement de choses de plus en plus loin de l'arrivée maintenant dans le vélo… S'il y en a qui veulent éliminer le plus de sprinteurs, ils ont tout intérêt. Le puncheur français est dans ces coureurs qui veulent rendre la course ingérable pour les sprinteurs, quitte à tout perdre. Est-ce que ça m'arrangerait ? Oui ».
Il y a cependant des limites à une offensive aussi loin : « Il y aura toujours une équipe qui va rouler entre la Cipressa et le Poggio. Ça me paraît compliqué ». Absent l'an passé pour cause de maladie, Julian est d'aplomb pour son retour sur la plus longue course (300 km) du calendrier et pourrait bien déjouer tous les scénarios attendus, à voir...
ACTE 3 : LE TOUR DES FLANDRES
"Le Tour des Flandres arrive juste derrière les Strade Bianche dans mes courses favorites, indiquait le coureur de 30 ans. À en regarder ses participations (2020 : abandon, 2021 : 42e), on pourrait croire que le double champion du monde n'a rien à faire dans cette course-là, mais sa première participation a d'entré déjouer ces commentaires. Véritable protagoniste de la Vlaanderens Mooiste, Julian était la presse maitresse de cette 104e édition.
Le Français a d’abord tenté sa chance à 49 kilomètres avant d'enquiller dans le Koppenberg (0.6 km à 11,6 %). Pas assez saignant, le champion du monde n'a pas hésité a récidivé une troisième fois et ainsi débloquer la course dans le Taaienberg (0.5 km à 6.6%). Pour constater son niveau, un trio magique composé avec lui de Wout Van Aert et Mathieu Van der Poel, personne ne reverra ce trio magique parti à 37 kilomètres d'Oodenaard.
Parti pour une bataille légendaire, tout s'est finalement arrêté pour Julian, la faute à un destin qui voulait que le scénario soit modifié. En train de parler avec son directeur sportif, le Français percutera de plein fouet une moto arrêté sur le bord de la route, il ne s'en relèvera pas. Les deux cyclocross man se sont décidé au sprint. Parti pour un premier monument de sa carrière, Van der Poel avait su éviter la moto de justesse, là où son adversaires était emmené à l'hôpital et constatera une fracture de la clavicule.
Rien n'a changé depuis 2020. Je ne veux pas prendre de poids pour être mieux sur les pavés, assumait Alaphilippe, lui qui en 2021 avait décidé de revenir sur le Ronde et d'épaulé son équipier et futur vainqueur devant Van der Poel, le Danois Kasper Asgreen au sprint. Je mise sur mon punch, quand je suis vraiment à 100%, je suis vraiment polyvalent. En tout cas, Julian se place en tant que favoris sur le Tour des Flandres malgré son poids assez léger pour des flandriennes.
D'un autre côté, il y a le phénomène Tadej Pogacar qui a fait déjouer cette affirmation comme quoi les "poids plume" n'avaient aucune chance sur les courses pavées. C'est même le Slovène qui a botté les fesses à Van der Poel avant que Dylan Van Baarle ne s'impose finalement en revenant de l'arrière. Amoureux des courses qui transcendent, le Français n'a pas caché son admiration pour la course belge et son atmosphère si épique.
Ce sont des courses où il y a une atmosphère. Surtout le Ronde en Belgique… C'est pour ça que je fais du vélo, c'est pour gagner ce genre de courses qui te transcendent par leur difficulté, leur histoire, la foule. Dans le dur, son équipe Quick Step se fait de moins en moins présente sur les classiques et doit compter sur un Alaphilippe solide pour supporter le poids de son équipe. Comme aux Strade, il se passe toujours quelque chose. Ça se fait à la jambe, au placement, pas de chichi, concluait-il.
ACTE 4 : LIÈGE-BASTOGNE-LIÈGE
Va-t-il enfin dompter la course qui occupe ses rêves depuis sept ans ? La relation entre lui et la Doyenne des classiques est assez tumultueuse. Suis-moi je te suis, suis-moi je te fuis. Julian lui court après depuis 2015 mis-à-part sa non-participation en 2017. C'est surement la course qui convient le mieux aux qualités du français, mais celle qui ne lui a toujours pas dit oui. Lui et Liège, c'est 7 participations en 10 saisons professionnelle, rare sont les saisons ou Alaphilippe ne court pas entre Liège et Bastogne.
Dès son premier dossard dans la course de renommée du calendrier en 2015, on a su que cette course ira un jour dans son palmarès. Julian Alaphilippe, du haut de ses 22 ans, est passé près d'un exploit majeur. Comme sur la Flèche Wallonne quelques jours auparavant, le puncheur tricolore avait buté face à un Alejandro Valverde au sprint pour sa 3e victoire. Pas dans le coup en 2016, absent en 2017, Julian s'est exprimé sur la course qui lui fait tant la tête.
« Elle a une histoire. Tous les coureurs ont du respect pour cette course. Beaucoup rêvent de la gagner, j'en fais partie, disait-il à la veille de la course en 2022. J'ai tout à gagner puisque je n'ai jamais triomphé... Depuis 2015, je rêve de gagner cette course. Ce n'est pas un secret. Mais je suis détaché de cette pression, annonçait-il ». Pour la première fois de sa carrière, en 2018, 'loulou' avait levé les bras sur la Doyenne, mais bien pour célébrer le sacre de Bob Jungels, parti à 20 bornes et laisser les favoris s'écharper entre eux.
Bien sûr, une autre fois, il a levé les bras, lors du terrible sprint de 2020 ou la course n'est pas rentré dans la légende, mais le sprint final si. Sortis dans la Roche-aux-Faucons en compagnie de Primoz Roglic (Jumbo-Visma), Tadej Pogacar (UAE Team Emirates) et Marc Hirschi (Sunweb), Julian Alaphilippe semblait le plus fort au sprint et contre toute attente, après avoir produit son effort et débordé tous ses concurrents, il eût la terrible idée de célébrer avant la ligne. Une grosse chute dans la descente de Wanne, à plus de 80 kilomètres de l’arrivée, le champion du monde a repris comme si de rien n’était, malgré deux changements de vélos et un changement de chaussure.
À ce moment-là, on pouvait se dire qu'il passerait enfin la bague au doigt à la Doyenne, mais Roglic eu "la bonne idée" de sprinter jusqu'à la ligne franchie. Julian verra passer un sentiment de joie intense, indescriptible voir de soulagement à un terriblement de désillusion, de confusion. Maillot de champion du monde sur le dos, on a vu un Julian tout sourire levé les bras pendant qu'à côté de lui, le second du Tour de France - dépecé de sa tunique jaune par Pogacar à la veille de l'arrivée - Primoz Roglic était en train de jeter son vélo. En une fraction de seconde, Julian a tourné la tête et compris que ce ne serra pas encore pour cette fois.
Un Monument pour deux erreurs monumentales. A rajouté à ce levé de bras pathétique, l'écart commis par le Français sur Marc Hirschi lui causant un déclassement. Pour Alaphilippe, il faudra encore au moins attendre un an pour succéder à Bernard Hinault. "Liège, c'est une course que j'adore, mais c'est souvent un scénario très fermé, même si Remco Evenepoel a gagné en partant de loin l'année dernière. On voit que c'est assez cadenassé, tout le monde s'économise pour le final alors que les Flandres, ça peut partir à 100 bornes de l'arrivée, comparait-il avec le Tour des Flandres.
L'année d'après, Julian Alaphilippe avait supprimé les deux erreurs de 2020, cela ne lui a pas empêché de rater de peu la victoire, tombé sur l'ogre Slovène Tadej Pogacar, bien décidé à succéder à Bernard Hinaut, vainqueur du Tour puis de liège la même saison. La science tactique du Slovène lui avait dit de se mettre dans la roue du champion du monde et de le déboiter le plus tard possible, bingo, à 22 ans, il était déjà vainqueur d'un premier monument. Il y aura moins de pression cette année sur Liège, le gros objectif, c'est le Tour des Flandres cette année, concluait-il, toujours dans l'optique de supprimé le stresse d'une course qui lui a toujours échappé. Et si c'était cette fois-ci la bonne ?
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